LA CONDUITE SOUS L’EMPIRE DE STUPÉFIANTS N’EST PAS SYSTÉMATIQUEMENT SANCTIONNÉE
Être contrôlé positif ne suffit pas toujours à vous condamner. Découvrez pourquoi une simple erreur de procédure peut tout faire basculer.
6/22/20253 min read


Une idée reçue à nuancer : être positif ne signifie pas toujours condamnation
L’idée selon laquelle toute personne contrôlée positive à l’usage de stupéfiants au volant serait inévitablement sanctionnée par la justice pénale mérite d’être nuancée. Un arrêt rendu le 15 octobre 2024 par la chambre criminelle de la Cour de cassation (n°24-80.611, publié au Bulletin) vient le rappeler avec force : le respect scrupuleux des droits de la défense prévaut, y compris face à des faits matériellement établis.
I. Les faits de l’espèce : une infraction caractérisée, une procédure viciée
Dans cette affaire, un automobiliste a été contrôlé positif à l’usage de stupéfiants lors d’un contrôle routier. Conformément aux dispositions du Code de la route, son véhicule a été saisi et son permis de conduire suspendu à titre conservatoire.
En apparence, toutes les conditions semblaient réunies pour une condamnation classique sur le fondement de l’article L.235-1 du Code de la route.
Cependant, la Cour de cassation a cassé les décisions des juridictions du fond au motif que le mis en cause n’avait pas été informé de son droit à solliciter une contre-expertise toxicologique. Cette omission, bien que formelle, a suffi à entraîner la nullité de la procédure et, par voie de conséquence, l’absence de toute condamnation.
II. Une décision juridiquement fondée : l’exigence d’un procès équitable
En droit, l’information du conducteur sur la faculté de demander une contre-analyse n’est pas un détail : elle constitue une garantie procédurale essentielle, relevant des droits de la défense et du droit à un procès équitable au sens de l’article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme.
La jurisprudence constante exige que toute mesure privative de liberté ou attentatoire à des droits fondamentaux (comme la conduite, la propriété d’un véhicule, etc.) soit précédée et accompagnée d’informations précises et loyales sur les droits du mis en cause.
En l’espèce, le défaut d’information a donc vicié l’ensemble de la procédure, et le contrevenant a pu récupérer tant son permis de conduire que son véhicule, et ce malgré la matérialité de l’usage de stupéfiants.
III. Une illustration frappante du droit positif : la procédure prime sur les faits
Cet arrêt constitue une photographie saisissante du droit français contemporain, dans lequel la régularité procédurale conditionne la validité du jugement, indépendamment de la gravité ou de l’évidence des faits reprochés.
Ainsi, peut-on être reconnu positif aux stupéfiants, avoir mis en danger les usagers de la route, et néanmoins échapper à toute sanction dès lors qu’une irrégularité formelle est caractérisée ?
La réponse est juridiquement affirmative. La Cour de cassation, gardienne de la légalité, ne juge pas la morale ou le danger, mais l’état du droit. Et en droit, une procédure viciée est une procédure nulle.
IV. Conclusion : dans un État de droit, tout se joue dans la procédure
Ce que cet arrêt enseigne, c’est que la procédure n’est jamais une formalité. Elle est la colonne vertébrale de la justice pénale, sans laquelle aucune vérité judiciaire ne peut valablement être proclamée.
Il est donc essentiel, pour tout justiciable, d’être assisté par un avocat compétent, capable d’identifier la moindre faille procédurale et de défendre ses droits avec rigueur. Car, en matière de droit routier comme ailleurs, le fond ne peut l’emporter sur la forme que si cette forme est respectée.
